Nathalie, porteuse du projet Le Clubhouse de Lille

Portrait Clubhouse

En quelques lignes, quelle est l’action de ton association ?

Notre association, Clubhouse France gère des lieux partout en France, appelés CLUBHOUSE. Et les Clubhouse sont des lieux qui accompagnent les personnes concernées par un troubles psychique (on parle de handicap psychique) vers une insertion sociale et professionnelle

Depuis quand existe-t-elle ?

L’association existe depuis 2010 en France, mais le modèle est bien plus ancien puisque le premier CLUBHOUSE créé dans le monde l’a été à New York en 1948 ! Aujourd’hui, il y a environ 350 CLUBHOUSE répartis sur les 5 continents dont 11 en France. Le CLUBHOUSE que je représente, le Clubhouse de Lille a lui, été créé en 2022.

Qu’est-ce qui t’a motivée à créer cette structure ? Quel est ton parcours ?

Ce qui m’a motivée ? D’abord le sujet de la santé mentale et du trouble psychique en particulier. S’engager pour une meilleure inclusion d’un public en situation de handicap qui est exclu, du fait de son handicap, alors qu’au contraire, on devrait lui tendre la main… Cette double peine vécue par les personnes en situation de handicap psychique est dure à accepter : non seulement on apprend un jour qu’on est atteint d’une maladie psychique invalidante à vie, mais en plus, que du fait de cette maladie, on vivra un parcours semé d’embûches, notamment sur le plan professionnel et qu’il faudra se battre deux fois plus … Et Clubhouse est là pour aider, accompagner ces personnes sur ce chemin, leur redonner du pouvoir d’agir, de la confiance, leur rappeler qu’ils sont des humains avec des talents et de compétences et aussi pour aider les entreprises de ne plus avoir peur de ces troubles et de savoir les gérer, les manager en entreprise. Voilà ce qui m’a motivée.

Ah oui aussi, l’idée qu’il n’y avait rien à Lille et qu’il fallait tout créer quand je suis arrivée, c’était une belle aventure !

Moi, à la base, je suis docteure en sociologie, spécialisée sur les questions de déviances et de normes sociales alors forcément ça me parlait aussi… J’ai fait plein d’autres métiers, dans la direction d’association et aussi comme entrepreneure. Tout m’a été utile pour créer le Club de Lille.

Y a t’il eu des éléments déclencheurs, des rencontres décisives
qui t’ont convaincue de passer à l’action ?

Il n’y a pas une ou des rencontres décisives. Il y a plutôt un cheminement personnel qui est parti, au début des questions liées aux addictions et aux usagers de drogues, sujets de mes premières études sociologiques. Et dans le cadre de ces recherches, j’ai donc approché, par la bande, la question des troubles psychiques (il y a en effet une surreprésentation des usages de psychotropes parmi les personnes vivant avec des troubles psychiques. Et déjà à l’époque, je me rendais compte que, hormis le parcours médical et hospitalier, il y avait peu d’options pour quelqu’un qui avait déjà assez fréquenté les hôpitaux et autres psychologues, pour s’accrocher et lui donner la force de repartir dans la vie, mais par lui même. Donc il n’y a pas eu besoin de me convaincre de rejoindre le projet ! 😊

Quelles difficultés as-tu rencontrées ?

A vrai dire, je n’ai pas eu de difficultés majeures au moment de la création du projet. Le projet était très attendu à Lille par les partenaires terrain engagés sur ce sujet.
Par contre, on œuvre au quotidien à la déstigmatisation des troubles psychiques et notamment dans le monde du travail. En effet ce handicap reste le plus mal accepté dans l’univers professionnel.
Parce que ce handicap est lié à des maladies qui font peur. Quand vous évoquez la bipolarité ou la schizophrénie par exemple, il n’est pas rare que les employeurs rencontrés, qui étaient prêts à engager une personne en situation de handicap, se mettent d’un coup à faire marche arrière, à être plus réticents. Et on comprend pourquoi. Aujourd’hui encore on ne les connait pas bien ces troubles, ou alors par le prisme des media (qui sont rarement élogieux à leurs sujets) ou du cinéma (je n’ai qu’à citer « Shining » et on a compris).
Et une de nos missions c’est justement de permettre la rencontre grâce à nos « membres » (les personnes accompagnées dans les CLUBHOUSE sont appelées membres), de créer des occasions d’échanges pour ensemble déconstruire toutes les idées préconçues et tous les préjugés à leur sujet. Une fois que la rencontre a eu lieu, que les échanges se sont faits, on ne voit plus que l’humain en face, avec tout ce qu’il a eu à traverser jusque-là, avec sa force, sa résilience et là, on a envie de lui tendre la main ! Donc la difficulté réside surtout dans l’image médiatique et publique souvent associée à ces troubles… Mais j’ai bon espoir que cela évolue dans les années à venir.

Quelles victoires, petites ou grandes, as-tu retenues de ce parcours ?

Les victoires que je retiens c’est bien sûr celles des personnes qu’on accompagne au quotidien, c’est Antoine qui vivait chez ses parents à 36 ans sans perspective d’avenir et qui, aujourd’hui, reprend ses études et fait un stage en entreprise ; c’est Véronique qui, après des années de dépression et d’isolement, est venue au Clubhouse, y a été une membre très appréciée et cette chaleur humaine et cet amour qu’elle a eu de notre communauté, elle s’en est servi pour rebondir. Aujourd’hui elle travaille et elle va mieux. C’est beaucoup d’histoires comme ça qui nous motivent tous les jours.

Comment vois-tu la suite ?

La suite je l’aimerais bien avec plus de Clubhouse sur notre territoire. Parce que pour le moment, dans les Hauts de France, il n’y en a qu’à Lille. Mais des besoins, il y en a partout !
Du coup-là, mon projet c’est d’ouvrir dans les autres départements et d’abord à Lens, dans le Pas de Calais et à Amiens dans la Somme pour commencer. Donc plein de belles autres histoires à écrire !

Que dirais-tu à quelqu’un qui voudrait se lancer dans l’aventure solidaire ?

Qu’il ne faut pas hésiter ! Il faut être prêt à s’accrocher, qu’il faut être convaincu, qu’il faut être motivé et savoir partager sa motivation, parce que le monde associatif, je ne parle que de lui puisque c’est ce que je représente ici, ce n’est pas toujours facile dans notre contexte économique actuel. A une époque où, dans tous les secteurs du social et du médicosocial, les subventions diminuent d’années en année, on doit faire pareil mais avec moins… Alors que le coût de la vie ne cesse d’augmenter… Mais malgré tout, c’est tellement enrichissant ! Beaucoup de personnes que je vois en recrutement ou dans d’autres contextes me disent qu’ils sont à la recherche de sens dans leur travail… Moi, je peux vous dire que je l’ai, le sens !

Ton mantra au quotidien ?

Alors j’en ai deux en fait, mais ils sont très liés parce qu’ils renvoient à une manière d’appréhender les choses/le monde :
« Un jour après l’autre » (quand j’ai énormément de travail, je divise tout en mini tâches et ça parait tout de suite moins impressionnant 😉 ).
Et je suis aussi très très partisane du « savoir profiter des petits bonheurs du quotidien » pour se sentir heureux tout le temps : un coup de fil qu’on n’attendait pas, une soirée improvisée avec des amis, une séance de fous rires avec mes enfants. Ces petits bonheurs de tous les jours, savoir les remarquer et les apprécier, ça change tout dans notre vision de la vie 😊

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